" La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène à la souffrance."

Keilah sortait de la fac lorsqu'elle décida de faire un tour plus long pour rejoindre son modeste loft. Elle voulait profiter du magnifique temps qui ornait le ciel, et qui, feintait la rendre un temps soit peu heureuse. Elle choisit l'avenue la plus côté de la ville, notamment pour son epoustouflante beauté et son rappel de tous les plus grands peintres français des siècles passés. Son regard s'attarda sur chacun des noms sculptés dans les colonnes en marbre.

Cette journée avait été horrible et être ici était son dernier réconfort. En plus d'être totalement amorphe de ne rien manger depuis deux jours, et d'être pris d'un mal de crane horrible, elle s'était engueulée avec Aaron sur le même point habituel : L’éternel amour qu'elle portait à Dwight. Précédemment, elle pouvait parler de ce genre de choses avec ses amis, mais il fallait avouer que ces derniers temps, elle n'avait guerre plus personne en qui se confier, l'amitié s'évaporait telle la brume matinale, et probablement ne reviendrait-elle jamais. Elle tenta de retenir son souffle une minute, sinon elle partirait dans une crise d'angoisse, et c'était bien la dernière chose qu'il lui fallait.

Peut-être était il venu le temps de se remettre en question, tout avait probablement toujours été de sa faute, peut-être n'était-elle pas assez fidèle, pourtant elle avait l'impression de l'être. Elle n'avait jamais trahi un ami, ne l'avez jamais poussé à l'échec et avait toujours été honnête et sincère. Alors, probablement que le point de rupture était ici, l'honnêteté ne faisait pas toujours bon ménage, et était souvent très dure à accepter. Néanmoins, tout ne pouvait guerre être sa faute, et elle avait trop d'orgueil pour réparer les pots cassés.

Elle traça doucement sa route, cheminant lentement dans la ruelle, ne regardant pas face à elle. Elle s'étonna elle même de ne pas s'être encore pris de poteaux, après tout cette journée était bien assez horrible pour qu'il lui arrive de nouveaux malheurs. Elle parla bien trop vite, puisqu'elle percuta quelque chose, ou plutôt quelqu'un, elle rougit immédiatement avant de lancer doucement :

« - Oh je suis dé... »

Son coeur manqua de louper un battement, elle était stupéfaite. Cela faisait deux ans qu'elle ne parlait plus à Dolores, et voilà qu'elle lui avait ré-adressée la parole en de telles conditions. Elle ne savait pas qu'elle attitude prendre, elle était encore en colère, mais peut-être le temps était-il venu de laisser les vieux cadavres au placard...

Keilah n'en revenait toujours pas, elle était en face d'elle et commençait à émettre des mots, que de toutes évidences la blonde n'entendait pas. Elle était bien trop occupée, à la scruter.Tous les souvenirs qu'elles avaient vécut ensemble lui revint. Il y a deux ans, elle traînait toujours ensemble, elles étaient presque inséparable. Mais voilà, que le destin des fois, s'éprend à jouer avec des gens inoffensifs, et parfois les évènements pouvaient mal tourner. D'un avis extérieur, le fait que les deux jeunes femmes se soient dit leurs quatre vérités, aurait du simplement les fâchés pour quelques jours. A croire que la rengaine et la haine peuvent conduire à bien des meurs, et cela faisait maintenant plus de deux ans que les deux jeunes femmes ne se parlaient plus.

C'était surement pour cela que Keilah était la plus stupéfaite. Elle n'imaginais pas que les premiers mots qu'elle dirait à Dolores put être ceux-là, et il fallait avouer que leur rencontre avait un côté relativement ironique. Néanmoins Keilah essayait de rester de marbre, certes elle aurait eu envie de lui sauter dans les bras et de s'excuser, mais elle savait qu'elle seule n'était pas en faute, et que les deux devaient faire un bout de chemin ensemble, alors pourquoi commencerait-elle ?

Elle percuta que la brune qui se tenait en face d'elle semblait quelque peu amorphe, et perdue. Perdue dans le sens où son corps semblait agir, en contradiction avec son esprit. Elle eu confirmation lorsque la jeune femme s'écarta et vomisse ses tripes sur le sol brûlant. Keilah ne put s'empêcher de se demander si la jeune femme développait la même maladie qu'elle, mais il était bien trop tôt pour y penser, pour l'instant elle percutait la haine dans le regard de son ancienne amie. « Oh, ne t'inquiète pas. Je ne l'ai pas pris pour moi. » Même si cette phrase résonnait vraie, Keilah ne pouvait que très peu y croire. Après tout, c'était peut-être encore une stratégie de sa part.

Elle empoigna allègrement son sac à main, avant d'y sortir un paquet de mouchoir, et de le tendre en direction de la brune. Elle ne la regarda pas dans les yeux de peur de partir dans un long combat sans merci. Elle préférait éviter tout contact, et si Dolores voulait lui parler ou exprimer quelque chose elle lui en répondrait, mais elle ne voulait pas commencer à jouer sur les sentiments, car elle savait pertinemment qu'elle se perdrait et pleurerait.

Oui, elle était émotive. D'ailleurs bien trop et certaines fois cela pouvait lui coûter préjudices. Elle n'était pourtant pas hypersensible, mais elle avait tellement l'habitude de souffrir, que seule les larmes étaient son unique échappatoire. Néanmoins elle se devait d'être forte, se forger une carapace pour montrer à la brune qu'elle pouvait très bien s'en sortir sans elle, même si c'était faux.

La jeune femme qui se tenait en face de la blonde ne semblait pas réellement contente de la voir. Il fallait avouer que Keilah quant à elle, ne ressentait pas vraiment de haine, mais était légèrement perdue dans cette vague d'émotion qui venait de la parcourir. Elle avait envie de pleurer, tout ce qui lui arrivait la rendait d'une telle tristesse, elle voyait sa vie en bas de l'échelle, sans réussir à la gravir. Elle était dans ce long précipice où personne ne souhaitait se jeter pour la sauver, elle ne sentait seule - et même Aaron ne comprenait pas ce qu'elle vivait. Dans une vague d'optimisme elle tenta de se remettre d’appoint, après tout à quoi bon s’apitoyer sur son sort ?

Elle regarda la jeune femme s'essuyer et se demanda comment se faisait-il qu'elle était dans un tel état en plein milieu de la journée, alors que le soleil battait encore son plein ? Il était vrai que c'était une des raisons pour laquelle elle ne parlait plus à la jeune femme, lorsqu'elle était partie dans son monologue, avouant à Dolores ses pires vérités, elle avait laissé s'échapper cette phrase " De toutes façons tu profites bien trop de la vie, un jour ça te posera des problèmes" et aujourd'hui elle l'a voyait dans la rue, en train de dégurgiter surement la petite biscotte qu'elle avait tenu en guise de dîner la veille. Keilah pensa instantanément qu'elle n'avait donc pas écouté ses reproches, et que ces deux années n'avaient pas été suffisantes. Néanmoins, en tant que bonne fille, elle pouvait lui laisser le bénéfice du doute, après tout, en devant amie avec elle, elle savait à quoi elle s'y tenait.

C'était bien son problème, elle avait toujours tendance à choisir des amis qui ne lui correspondait pas du tout, mais après tout c'était peu être cette différence qui faisait leur force. Malgré tout cela, Dolores lui manquait. Elle savait qu'elle arriverait à la faire rire dans n'importe qu'elle situation, et rien que cette idée lui donnait des frissons - oui, ça faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas souris ... « - Est-ce que ça va ? » Elle avait tenté de nouer le contact, après tout, il était peut-être temps de fermer définitivement la porte des vieux cadavres et de se lancer dans une nouvelle aventure. Elle avait enfin envie de profiter de la vie, et c'était bien avec elle, et elle seule qu'elle pourrait le faire ...