Le moment que je redoutais tant venait d'arriver. Nous étions assis l'un en face de l'autre dans ce somptueux restaurant, mon visage penché vers le sien, sa main qui caressait le dos de la mienne. Un instant fort en émotions, nous fêtions nos 5 ans ensemble. Des années de pur bonheur et d'amour intense. Je l'aimais plus que tout, plus que n'importe quel être vivant sur cette terre. Elle était mienne et je la voulais pour le reste de ma vie. Je ne m'étais jamais imaginé faire ça si tôt, pourtant l'envie me tiraillait. On était prêt pour ce genre d'engagement, prêt à s'aimer jusqu'à la mort. Lorsque le serveur nous apporta notre dessert ainsi que deux coupes de champagne je pris mon courage à deux mains. Je me levai de ma chaise, puis posai un genou à terre ne quittant pas son regard je pris sa main dans la mienne et commença ma déclaration. 'Eïleen depuis 5 ans tu m'apporte tout ce dont je désire. Tu m'as fait changer, évoluer en un homme bien. Je n'arrive pas à concevoir mon avenir sans toi. Tu es ma moitié, la femme de ma vie, celle en qui j'ai confiance, à qui je peux tout dire. Sans toi je ne sais pas ce que je serai aujourd'hui, un homme perdu sans doute.' Reprenant ma respiration et tentant de calmer les battements de mon cœur je sortis de ma poche le boitier en velours noir puis l'ouvris tout doucement en sa direction. Remontant vers son visage, je fus heureux de voir sa réaction : les yeux pétillants, un sourire immense qui remontait jusqu'à ses oreilles, elle plaqua ses mains contre sa bouche pour étouffer son cri de joie. Elle prit ma main puis me releva. Nous nous retrouvâmes debout face à tous ces gens inconnus qui nous dévisageaient. Elle prit mon visage entre ses mains et m'embrassa, des applaudissements retentirent dans la salle, je me détachai de son visage et rigola doucement. Je n'avais même pas eu le temps de lui poser LA question, c'est alors que je m’approchai de son oreille et lui murmura tendrement : 'Veux-tu m'épouser ?'. Je sentis un hochement de tête, instinctivement je resserrai mon étreinte autour d'elle. J'étais l'homme le plus heureux.

La nouvelle de notre engagement ne se fit pas attendre, tout notre entourage était au courant dés l'instant où nous avions mis les pieds hors du restaurant. Ma mère m'avait d'abord hurlé dessus, me disant que 22 ans c'était beaucoup trop tôt pour prendre un tel engagement, mais mes arguments vinrent à bout de ses peurs. Elle pleura de joie au téléphone. Tout le monde se réjouissait de notre bonheur et bien évidemment tout le monde désirait savoir la date du mariage. Après des heures de discussions avec Eïleen nous décidâmes de faire cela dans la foulée. Pourquoi attendre un an ? L'amour n'attend pas. Et nous étions prêt, main dans la main nous rassemblâmes toutes nos économies. On ne voulait pas d'un mariage trop voyant, quelque chose de discret nous convenait mieux. Les préparatifs avançaient à pas de géants, Eïleen avait trouvé sa robe, moi mon costume. L'église nous accueillait à bras ouvert, nous trouvâmes notre traiteur et la salle de réception. Le mariage approchait, plus qu'une dizaine de jours et Eïleen sera enfin ma femme. La mienne, celle de personne d'autres. Du moins c'est ce dont j'étais persuadé. Elle venait de jeter tout un tas d'affaires, voulant faire du tri pour notre nouvelle vie. Epuisée par tout ce rangement elle alla prendre un bain, l'idée de la rejoindre me traversa l'esprit mais je voulais d'abord mettre à la poubelle tous ses sacs qui trainaient dans l'entrée. Une carte qui dépassait de l'un d'entre eux m'interpella, je ne voulais en rien fouiller dans ses affaires. Mais ma curiosité pris-le dessus. Je la tirai du sac, le dessus ne me disait rien, je l'ouvris pour faire le destinataire : Ezra. Un nom inconnu au bataillon, certainement un cousin ou une autre personne de sa famille dont elle ne m'aurait jamais parlé. Naïf, voilà ce que je suis. Parcourant des yeux ce qui était écrit certaines phrases me serrèrent le cœur. 'J'ai adoré tous nos moments passé ensemble' , 'Tu fais une énorme en l'épousant, il n'est pas fait pour toi.' , 'Reviens moi je t'en prie.' , 'Tu sais que je suis l'homme qu'il te faut, celui qui te fera rire, croquer la vie à pleine dents, l'amour comme une bête ...' , 'Notre dernière fois ensemble fut la plus magique de toute.' , 'Je t'aime ma puce.' Pris de vertiges je tombai raide sur le sol, me répétant chacun des mots que je venais de lire. C'était impossible, 5 années passées ensemble et je n'avais pas pu voir ce qui se tramait dans mon dos. Elle me trompait. Elle m'avait trahie. L'imaginant comme la femme parfaite je redescendis vite de mon petit nuage. Des larmes roulèrent sur mes joues, prenant ma tête entre mes mains je voyais tout mon avenir s'effondrer en mille morceaux. Notre relation était construite sur un mensonge. Pris d'une colère folle j'entrai dans la salle de bain claquant la porte, je lui balançai sa lettre à la con et la dévisagea de dégoût. Sa réaction ne se fit pas attendre, ses yeux s'écarquillèrent, elle savait qu'elle ne pouvait se défendre prise de panique elle sortit de son bain enfila son peignoir et s'approcha de moi. 'Ne me touche pas Eïleen !' luis dis-je avant qu'elle ne le fasse. 'Laisse-moi t'expliquer ...' je lui coupai la parole. 'Il n'y a rien à expliquer ! Tu me prends pour un idiot ? Tu pensais avoir la conscience tranquille en jetant cette putain de lettre ? Jamais je ne t'aurais fait ça, JAMAIS ! Mais toi apparemment tu n’en as rien à foutre de moi. Tu n'es plus rien à mes yeux, tu m’entends ? PLUS RIEN. Je ne veux rien à voir avec toi, je te raye de ma vie.' Mes larmes ne cessaient de couler, je ne voulais pas pleurer pour elle mais la colère et déception était trop forte pour que je les retienne. 'On est fiancé, on allait se marier dans 10 jours ...' Je donnai un coup de pied dans le sac de linge, je l'a pris par les épaules la fixant du regard elle était pétrifiée. 'Ne t'avise pas de me joindre, de me chercher ou quoique ce soit. Toi et moi c'est fini, je romps notre engagement. Tu n'auras qu'à expliquer à tout le monde le pourquoi du comment ... Une dernière chose, je te hais Eïleen. Je te hais de m'avoir fait ça, de m'avoir trahie.'

Voilà comment je me suis retrouvé à Athens, la vie à Londres n'était plus possible. La peur de la croiser, de voir des personnes qui s'apitoierait de mon sort me faisait vomir. J'ai donc fuis toutes responsabilités. Ce n'étais pas forcément une bonne idée, mais vivre là-bas avec cette haine constante en moi n'étais plus envisageable. Les Etats-Unis m'ont alors accueilli à bras ouverts, sauf que c'est relativement vaste comme territoire. Je ne savais pas où aller, un endroit où personne n'irait me retrouver, un endroit où aucunes personnes ne me connaîtraient. Je pris une carte des USA, ferma les yeux et avec le bout de mon doigts je décrivis des cercles inégaux puis au bout d'une trentaine de secondes arrêta mon doigt. Arkansas, me voilà ! Cela fait maintenant trois ans que je vis aux Etats-Unis, le mal du pays est maintenant partis, je me suis habitué aux coutumes locales. Je me retrouve serveur dans un restaurant pas très loin de mon appartement où je vis en colocation avec Jordan. Une femme extraordinaire à qui je dois énormément. Notre relation est légèrement compliquée et reste entre nous. La vie y est différente, mais elle me plaît ainsi.